Deuxième livre de Samuel

01 La guerre fut longue entre la maison de Saül et la maison de David. Mais David allait se fortifiant, tandis que la maison de Saül allait s’affaiblissant.

02 Dans la ville d’Hébron, des fils naquirent à David. Son premier-né fut Amnone, d’Ahinoam de Yizréel ;

03 le deuxième, Kiléab, d’Abigaïl, femme de Nabal de Carmel ; le troisième, Absalom, fils de Maaka, fille de Talmaï, roi de Gueshour ;

04 le quatrième, Adonias, fils de Hagguith ; le cinquième, Shefatya, fils d’Abital ;

05 le sixième, Yitréam, d’Égla, femme de David. Ceux-là naquirent à David, dans la ville d’Hébron.

06 Au cours de cette guerre entre la maison de Saül et la maison de David, Abner renforçait sa position dans la maison de Saül.

07 Or, Saül avait eu une concubine nommée Rispa, fille de Ayya. Ishbosheth dit à Abner : « Pourquoi es-tu allé vers la concubine de mon père ? »

08 À ces paroles d’Ishbosheth, Abner fut pris d’une violente colère et dit : « Suis-je une tête de chien au service de Juda ? Aujourd’hui, j’agis en toute fidélité envers la maison de ton père Saül, envers ses frères et ses amis, je t’empêche de tomber aux mains de David, et toi, tu viens me reprocher aujourd’hui une faute avec cette femme !

09 Que Dieu amène le malheur sur moi, Abner, et pire encore, si je ne fais pas pour David ce que le Seigneur lui a promis par serment :

10 enlever la royauté à la maison de Saül, ériger le trône de David sur Israël et sur Juda, depuis Dane jusqu’à Bershéba ! »

11 Ishbosheth ne put répliquer un mot à Abner, tant il avait peur de lui.

12 Abner envoya, en son propre nom, des messagers dire à David : « À qui appartient le pays ? » Et il ajouta : « Conclus donc une alliance avec moi, et je te prêterai main-forte pour que tout Israël se tourne vers toi. »

13 David répondit : « Bien ! Je vais conclure une alliance avec toi. Seulement, je te demande une chose : tu ne seras admis en ma présence que si tu amènes d’abord Mikal, fille de Saül. À cette condition, tu pourras venir en ma présence. »

14 Alors David envoya des messagers à Ishbosheth, fils de Saül, pour lui dire : « Donne-moi donc ma femme Mikal : je l’ai acquise pour épouse contre cent prépuces de Philistins. »

15 Ishbosheth envoya prendre Mikal chez son mari, Paltiel fils de Laïsh.

16 Celui-ci partit avec elle et la suivit en pleurant jusqu’à Bahourim. Abner lui dit alors : « Va-t’en, retourne ! » Et il s’en retourna.

17 Abner engagea des pourparlers avec les anciens d’Israël. Il leur dit : « Depuis longtemps déjà, vous désirez que David soit votre roi.

18 C’est le moment d’agir ! En effet, le Seigneur a déclaré au sujet de David : “Par la main de mon serviteur David, je sauverai mon peuple Israël de la main des Philistins et de la main de tous ses ennemis”. »

19 Abner parla aussi avec les Benjaminites ; puis il alla lui-même à Hébron parler avec David de tout ce qui paraissait bon à Israël et à toute la maison de Benjamin.

20 Abner arriva donc chez David à Hébron ; vingt hommes l’accompagnaient. David fit un festin pour Abner et ses compagnons.

21 Abner dit à David : « Je vais me mettre en route et rassembler tout Israël auprès de mon seigneur le roi. Ils concluront une alliance avec toi, et tu régneras partout où tu le désires. » Puis David congédia Abner qui s’en alla en paix.

22 Mais voici que Joab et les serviteurs de David revenaient d’une razzia, ramenant un énorme butin. Abner n’était plus à Hébron auprès de David, puisque celui-ci avait congédié Abner qui était parti en paix.

23 Quand Joab et toute son armée furent arrivés, on vint annoncer à Joab : « Abner, fils de Ner, est venu chez le roi. Celui-ci l’a congédié et il est parti en paix. »

24 Alors Joab entra chez le roi et lui dit : « Qu’as-tu fait ? Voilà donc qu’Abner est venu chez toi ! Pourquoi l’as-tu congédié et a-t-il pu repartir ?

25 Tu connais Abner, fils de Ner : c’est pour te séduire qu’il est venu, pour observer tes allées et venues et savoir tout ce que tu fais. »

26 Joab sortit de chez David et envoya à la poursuite d’Abner des messagers qui le ramenèrent depuis la citerne de Sira ; mais David n’en savait rien.

27 Quand Abner fut ramené à Hébron, Joab l’attira à l’intérieur de la Porte comme pour lui parler tranquillement. Là, il le frappa au ventre et le fit mourir, pour venger le sang d’Asahel, son frère.

28 Lorsque, par la suite, David apprit cela, il déclara : « Je suis à jamais innocent devant le Seigneur, moi et mon royaume, du sang d’Abner, fils de Ner.

29 Qu’il retombe sur la tête de Joab et sur toute la maison de son père ! Que la maison de Joab ne manque jamais d’hommes atteints de maladies purulentes ou de lèpre, ou réduits aux occupations domestiques, ou victimes de l’épée ou privés de pain ! »

30 Si Joab et son frère Abishaï avaient assassiné Abner, c’est qu’il avait fait mourir leur frère Asahel, à la bataille de Gabaon.

31 David dit à Joab et à tout le peuple qui était avec lui : « Déchirez vos vêtements, revêtez-vous de toile à sac, prenez le deuil pour Abner ! » Et le roi David marchait derrière la litière.

32 On ensevelit Abner à Hébron. Le roi éclata en sanglots sur la tombe d’Abner, et tout le peuple se mit à pleurer.

33 Puis le roi entonna cette lamentation sur Abner : « Abner devait-il mourir comme meurt un insensé ?

34 Tes mains n’ont pas été liées, ni tes pieds, mis aux fers. Comme on tombe sous les coups de criminels, tu es tombé ! » Et tout le peuple se remit à pleurer sur lui.

35 Comme tout le peuple approchait pour faire prendre à David quelque nourriture, alors qu’il faisait encore jour, David fit ce serment : « Que Dieu amène le malheur sur moi, et pire encore, si je goûte au pain ou à quoi que ce soit, avant le coucher du soleil ! »

36 Tout le peuple s’en rendit compte et le trouva bon, de même qu’il trouvait bon tout ce que faisait le roi.

37 Ainsi, tout le peuple et tout Israël comprirent, ce jour-là, que le roi n’était pour rien dans la mort d’Abner, fils de Ner.

38 Le roi dit à ses serviteurs : « Ne comprenez-vous pas qu’en ce jour, un prince – un grand – est tombé en Israël ?

39 Et moi, aujourd’hui je suis faible, bien que roi par l’onction, alors que ces hommes-là, les fils de Cerouya, sont plus durs que moi. Mais que le Seigneur rende au méchant selon sa méchanceté ! »