Livre de Ben Sira le Sage

01 Une grande inquiétude est la part de tout homme, un joug pesant accable les fils d’Adam, depuis le jour où ils sortent du ventre de leur mère jusqu’au jour où ils retournent à la mère universelle.

02 L’objet de leurs réflexions, la crainte de leur cœur, c’est la pensée de ce qui les attend, c’est le jour de leur mort.

03 Depuis celui qui siège sur un trône de gloire jusqu’à celui qui est humilié sur la terre et la cendre,

04 depuis celui qui porte la pourpre et la couronne jusqu’à celui qui est vêtu d’étoffe grossière,

05 ce n’est que colère, jalousie, trouble, agitation, crainte de la mort, rancune et discorde. Et quand on prend du repos sur son lit, le sommeil de la nuit perturbe les idées :

06 à peine est-on assoupi, voilà qu’en rêve, comme de jour, on s’épuise et, troublé par des visions imaginaires, on se prend pour un fuyard échappé du combat.

07 Au moment de la délivrance on se réveille, tout étonné de sa vaine frayeur.

08 Ainsi en va-t-il pour toute chair, depuis l’homme jusqu’à la bête, et pour le pécheur sept fois plus encore :

09 peste, sang, querelle, épée, malheurs, famine, destruction et fléaux !

10 C’est contre les gens sans loi que tout cela a été créé, et c’est à cause d’eux que survint le déluge.

11 Tout ce qui vient de la terre retourne à la terre et ce qui vient des eaux fait retour à la mer.

12 Tout cadeau corrupteur part en fumée, mais la fidélité se maintient à jamais.

13 La fortune des escrocs s’épuisera comme un cours d’eau en été, elle n’est qu’un grand coup de tonnerre dans l’orage.

14 Aussi vrai qu’ils se sont réjouis de prendre à pleines mains, les corrompus iront à la ruine.

15 Les rejetons des impies ne donnent pas de rameaux, leurs racines impures ne trouveront que rochers arides.

16 Ou bien, comme le roseau qui prolifère au bord de l’eau, on les arrachera avant toute autre plante.

17 Mais la générosité est un jardin de bénédictions, et l’aumône demeure à jamais.

18 Celui qui se suffit à lui-même ou celui qui travaille a une vie agréable, mais plus encore celui qui trouve un trésor.

19 Avoir des enfants et fonder une ville, c’est perpétuer son nom, mais on estime plus encore la femme irréprochable.

20 Le vin et la musique réjouissent le cœur, mais plus encore l’amour de la sagesse.

21 La flûte et la harpe donnent du charme à la mélodie, mais plus encore une jolie voix.

22 Grâce et beauté sont le plaisir des yeux, mais plus encore la verdure des champs.

23 Amis et compagnons, c’est à propos qu’ils se retrouvent, mais plus encore la femme avec son mari.

24 Frères et protecteurs sont utiles aux mauvais jours, mais plus encore l’aumône qui délivre.

25 L’or et l’argent affermissent la démarche, mais on apprécie plus encore un bon conseil.

26 La richesse et la force donnent un cœur confiant, mais plus encore, la crainte du Seigneur. Avec la crainte du Seigneur, rien ne manque ; avec elle, nul besoin de chercher secours.

27 La crainte du Seigneur est un jardin de bénédiction, plus que toute gloire elle protège.

28 Ne vis pas de mendicité, mon fils, mieux vaut mourir que mendier !

29 L’homme qui regarde vers la table d’un autre, son existence n’est pas une vie. Il se souille avec la nourriture d’autrui, alors qu’un homme avisé, bien éduqué, s’en gardera.

30 À la bouche de celui qui n’a honte de rien, la nourriture mendiée est douce, mais elle brûlera ses entrailles.